
Comment évaluer les autres risques du patient en surpoids ou obèse ?
Rédigé par Sarra Smati le 23/05/2023
Le surpoids et l’obésité sont des facteurs de risque importants de MAFLD mais aussi de diabète de type 2, de risques cardio-vasculaires et de cancers.
Le diabète de type 2
Une personne obèse a 3 fois plus de risques qu’une personne non-obèse d’être diabétique.
L’examen recommandé en première intention est la mesure de la glycémie plasmatique à jeun (après 8 heures de jeûne).
Le diabète est défini par une glycémie plasmatique à jeun ≥ 1,26 g/L, à confirmer par un 2ème contrôle rapproché.
Une glycémie veineuse ≥ 2 g/L, quel que soit le moment de la journée, associée à des symptômes de diabète suffit à affirmer la présence d’un diabète.
Enfin, bien que l’usage de l’hyperglycémie provoquée orale (HGPO, 75 g de glucose) ne soit pas recommandé en première intention pour le dépistage du diabète de type 2 (DT2), une valeur glycémique ≥ 2 g/L 2 heures après la charge orale en glucose permet d’affirmer le diagnostic de diabète.
Il est à noter qu’une glycémie < 1,26 g/L mais ≥ 1,10 g/L indique la présence d’une hyperglycémie modérée à jeun, soit un état de pré-diabète, très à risque de basculer à court ou moyen terme vers le diabète.
Qui adresser au diabétologue ?
Ces patients sont à adresser au diabétologue en cas de :
- difficultés à atteindre la cible glycémique
- présence des complications multiples du diabète
- classification du diabète en DT2 non univoque
- réticence quant à la nécessité de la prise en charge de son diabète : questionnement sur le traitement, besoin d’informations supplémentaires.
Traitements :
Parmi les molécules disponibles pour le traitement du diabète, les analogues du récepteur du GLP-1 et les inhibiteurs SGLT2 ont fait la preuve de leur efficacité en termes de prévention cardiovasculaire et constituent le traitement de choix chez les patients à risque cardiovasculaire élevé. La metformine, les sulfamides hypoglycémiants et les inhibiteurs DDP-4 ont un effet neutre sur le risque cardiovasculaire.
Les risques cardio-vasculaires
Le surpoids et l’obésité favorisent l’apparition de facteurs de risque cardiovasculaires tels que l’hypertension artérielle et les dyslipidémies
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Hypertension artérielle (HTA)
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L’HTA est définie par une pression artérielle systolique ≥ 140 mmHg et/ou une pression artérielle diastolique ≥ 90 mmHg, confirmée au minimum par deux mesures lors de trois consultations successives sur une période de 3 à 6 mois.
Cependant, la valeur pronostique de la mesure de la pression artérielle en automesure ou en MAPA (mesure automatisée de la pression artérielle) est meilleure que celle mesurée au cabinet. La définition de l’HTA avec ces méthodes de mesure est légèrement différente :
- 135/85 mmHg en automesure
- 130/80 mmHg moyenne sur 24 heures en MAPA
Exemple de fiche d’automesure à remettre au patient : ici
L’HTA affecte 40% de la population adulte. Sa probabilité de survenue est d’autant plus élevée qu’il existe un syndrome métabolique sous-jacent.
Elle doit donc être recherchée de façon systématique chez les patients atteints de NAFLD.
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Dyslipidémie
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La dyslipidémie peut combiner un ou plusieurs des éléments suivants :
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LDL-cholestérol élevé HDL-cholestérol bas Triglycérides élevés
Le LDL-cholestérol est calculé :
- grâce à la formule de Friedewald à condition que les triglycérides soient ≤ 3,4 g/L :
LDL-cholestérol (g/L) = Cholestérol Total (g/L) – HDL-cholestérol (g/L) – (Triglycérides (g/L)/5)
- par dosage direct en cas de triglycérides > 3,4 g/L
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La cible de LDL-cholestérol est personnalisée et dépend de l’évaluation du risque cardio-vasculaire global du patient. Des outils d’aide à l’évaluation de ce risque sont disponibles, tels que le SCORE 2 pour les personnes de 40 à 69 ans et le SCORE 2-OP pour les personnes de plus de 70 ans.
Il est à noter que ces algorithmes ne sont pas utilisables chez les patients atteints de diabète.
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Un HDL-cholestérol bas (< 0,4 g/L chez l’homme et < 0,5 g/L chez la femme) est un marqueur de risque, mais pas un facteur de risque indépendant (pas de notion de lien de causalité directe avec l’athérosclérose). Le dosage du HDL-cholestérol est utile pour évaluer le risque cardiovasculaire, cependant, normaliser sa concentration ne constitue actuellement pas une cible.
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Le rôle de l’hypertriglycéridémie sur le risque cardiovasculaire est moins évident que celui de l’augmentation du LDL-cholestérol. Cependant, dans le contexte du syndrome métabolique, l’hypertriglycéridémie combinée avec un taux de HDL-cholestérol bas est associée à une augmentation du risque cardiovasculaire.
L’exploration d’une anomalie lipidique nécessite un bilan sanguin :
- effectué après 12 heures de jeûne
- qui doit être complet et répété en cas d’anomalies pour confirmation
- en l’absence d’anomalie, le bilan est à contrôler tous les 3 ans, sauf pour les patients présentant un diabète de type 2 chez qui il doit être vérifié une fois par an.
Les risques de cancers
Le surpoids et l’obésité représentent ainsi le troisième facteur de risque évitable de cancer après le tabac et l’alcool (Arnold M, et al. 2018. CancerEpidemiol, et Institut National du Cancer. Nutrition et prévention primaire des cancers : actualisation des données; 2015).
De nombreuses études ont montré une association entre le surpoids et l’obésité et la survenue de certains types de cancers à l’exemple du cancer du côlon et du rectum, de l’utérus, du sein (après la ménopause), des ovaires, du foie, du rein, du pancréas, de l’œsophage ou de l’estomac.
En France, le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a estimé que sur les 346 000 nouveaux cas de cancers de l’année 2015 (chez les personnes dont l’âge est ≥ 30 ans), 18 600 étaient attribuables au surpoids et à l’obésité, soit 5,4 % des nouveaux cas de cancers (6,8 % chez les femmes et 4,2 % chez les hommes).
De plus, l’obésité sévère est associée à une mortalité liée au cancer accrue avec un risque relatif estimé à 52% chez l’homme et 62% chez les femmes (tous types de cancers confondus) par rapport aux personnes présentant un IMC normal, (Ewertz et al., JCO 2011).
Plusieurs mécanismes physiopathologiques sont impliqués dans la relation obésité/cancers. Certains mécanismes sont communs aux différents types de cancers, tels que :
- l’insulinorésistance et l’hyperinsulinisme qui en découle. Une hyperinsulinémie chronique entraine une production accrue de l’hormone insulin-like growth factor-1 (IGF-1) favorisant ainsi la prolifération cellulaire
- l’état inflammatoire chronique à bas bruit, induit par l’obésité, favorisant le stress oxydatif dont la peroxydation lipidique pouvant induire des erreurs au niveau de l’ADN
- les perturbations de sécrétions hormonales telles que celles des œstrogènes, androgènes et progestérone peuvent également être impliquées dans le risque de cancer associé à l’obésité. L’aromatase, enzyme du tissu adipeux, permet la conversion des androgènes en œstrogènes. Son activité est augmentée en cas d’obésité menant à une élévation du taux d’œstrogènes qui stimule la multiplication des cellules des tissus hormono-dépendants (sein, endomètre, ovaire).
La prévention et le dépistage des complications liées au surpoids et à l’obésité constituent donc un objectif majeur auprès de ces patients à risque.